«  Un actionnaire est toujours bénéficiaire de l’action d’autrui » tiré du Livre de la déraison souriante de Robert Sabatier.

Héritiers de parts sociales démembrées, l’arrêt de principe rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation en date du 27 mai 2015 devrait répondre à toutes vos interrogations concernant l’octroi de dividendes par prélèvement sur les réserves.

Dans cette affaire, une personne est décédée le 14 avril 2009, laissant pour lui succéder son épouse et ses deux enfants.

La déclaration de succession ayant été enregistrée le 19 janvier 2010, les héritiers ont déposé le 28 avril 2010 une déclaration de succession rectificative faisant état d’un passif successoral, non pris en compte lors de l’établissement de la première déclaration de succession.

Selon les ayants droit, ce passif résulterait d’une dette de restitution du défunt. En effet, ce dernier, usufruitier de parts sociales d’une société civile, avait bénéficié, au titre du quasi-usufruit, de la distribution de réserves décidée par assemblée des associés. Par ailleurs, le procès-verbal de l’assemblée mentionnait que, pour les parts sociales dont la propriété est démembrée, le nu-propriétaire aurait droit au dividende distribué, mais que l’usufruitier exercerait son droit de quasi-usufruit sur le dividende distribué et que ce dividende lui serait donc payé.

N’ayant pas obtenu de réponse à leur réclamation, les héritiers ont assigné l’administration fiscale pour obtenir le remboursement des droits superflus.

La Cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 25 février 2014 n’a pas fait droit à leur demande au motif que la dette de restitution instaurée ne trouvait pas son origine dans la loi, mais dans la convention intervenue entre les nus-propriétaires et l’usufruitier. Les juges parisiens ont notamment affirmé que cette dette aurait pu faire l’objet d’une déduction à condition que celle-ci ait été « consentie par acte authentique ou par acte sous seing privé ayant date certaine avant l’ouverture de la succession autrement que par décès ».

La chambre commerciale de la Cour de cassation, casse cette décision en considérant que les juges d’appel ont violé les articles 587 et 1842 du Code civil, 768 et 7732 du Code général des impôts.

En effet, selon la Haute Cour : la collectivité des associés ayant « décidé de distribuer un dividende par prélèvement sur les réserves, le droit de jouissance de l’usufruitier de droits sociaux s’exerce, sauf convention contraire entre celui-ci et le nu-propriétaire, sous la forme d’un quasi-usufruit, sur le produit de cette distribution revenant aux parts sociales grevées d’usufruit, de sorte que l’usufruitier se trouve tenu [ … ], d’une dette de restitution exigible au terme de l’usufruit et qui, prenant sa source dans la loi, est déductible de l’actif successoral lorsque l’usufruit s’éteint par la mort de l’usufruitier ».

La présence de droits sociaux démembrés accroît considérablement les difficultés liées au règlement d’une succession, s’armer d’un avocat habile en la matière est donc fortement préconisé.

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