Le 11 janvier 2013 une grande figure de la toile est décédée. Son nom ne vous évoquera peut-être rien mais il était un vrai génie de l’informatique. Nous parlons ici d’Aaron Swartz, 26 ans, qui a malheureusement décidé de mettre fin à ses jours le 11 janvier 2013 dans son appartement de Brooklyn.

Ce génie précoce avait, dès l’âge de 14 ans, participé à l’élaboration de la spécification 1.0 du format RSS (Really Simple Syndication) qui permet aujourd’hui à tous de disposer d’un maximum de sources d’informations en temps réel sur le Net. Il avait également créé le premier blog non officiel sur Google avant d’élaborer Reddit, un outil permettant de constituer des pages Web en quelques clics. Enfin, il était l’un des précurseurs dans la création de la fameuse licence Creative Commons.

Aaron Swartz était également un révolutionnaire. Il était en quelque sorte un « justicier de l’internet », il menait un dur combat avec son groupe Demand Progress contre les lois SOPA et PIPA (législation américaine sur le piratage informatique)  mais cette lutte pour l’accès libre à l’information a fini par le mener à sa perte.

En effet, le 19 juillet 2011, cet activiste s’est retrouvé accusé d’avoir mis en ligne près de 5 millions d’articles scientifiques uniquement accessibles par abonnement en provenance du MIT (Massachussetts Institute of Technology) et du système d’archivage en ligne de publications universitaires et scientifiques (JSTOR) afin de les mettre gratuitement à la disposition du public. Suite à ce délit, Monsieur Swartz s’est fait activement harceler par la justice américaine et par le MIT. Ainsi, le Procureur américain en charge de l’affaire a requis une peine de pas moins de 35 ans de prison et 1 million de dollars d’amende !

Ce génie a été victime d’un acharnement de la part de la justice américaine et du MIT puisque l’organisation JSTOR n’a officiellement jamais été impliquée dans la démarche judiciaire.

Selon le terrible témoignage de ses proches, la mort de Swartz est « le résultat d’un système judiciaire où l’intimidation et les poursuites excessives sont monnaies courantes » et « les décisions prises par le bureau du Procureur et le MIT ont contribué à sa mort ».

Suite à ce tragique décès, le président du MIT, Rafael Reif, a été obligé de réagir publiquement et a décidé de diligenter une enquête interne afin de déterminer quel a pu être le rôle de l’institution dans le suicide d’Aaron Swartz.

Les internautes ont désormais pour but de faire de l’informaticien et du programmeur de génie le symbole de la lutte en faveur d’un Internet libre face à une justice américaine impitoyable. La mort tragique de ce jeune homme de talent n’aura donc pas été vaine puisque depuis lors de nombreuses attaques se sont portées contre les procureurs américains et la sévérité des peines encourues par les hackers en tout genre.

Depuis quatre jours, deux pétitions ont été déposées sur le site de la Maison Blanche. Elles ont recueilli des milliers de signatures et celles-ci ne font qu’augmenter de jour en jour. L’une réclame le renvoi de Carmen Ortiz de son poste et l’autre demande à Barack Obama d’accorder la grâce présidentielle à titre posthume pour Aaron Swartz.

Cette funeste histoire nous rappelle la mésaventure de Roman Polanski, un français qui avait eu quelques démêlés aux Etats-Unis en 1977. En effet, la ténacité de la justice américaine n’est plus à prouver puisque près de 30 ans après les faits, un mandat d’arrêt international avait été pris pour arrêter le cinéaste afin que ce dernier soit extradé et jugé par les tribunaux américains.

On peut donc se demander, au vu de ces deux récits, si la tolérance zéro de cette justice américaine ne la mènerait-elle pas trop loin en la poussant vers un véritable acharnement qui paraît souvent injustifié.

Alexandra GHERARDI
Juriste

Le 21/01/2013

Sources : www.liberation.fr « Aaron Swartz, le feu RSS » par Fabrice Rousselot ; www.pcworld.fr « Aaron Swartz : disparition tragique d’un révolutionnaire du Web » par Michel Beck.

Catégories : Civil