« Garde à vue: bande annonce de la prison préventive. On en ressort fripé, pas rasé, mais plus connu » (Philippe Bouvard).

Cible tout d’abord de la Cour Européenne des Droits de l’Homme, puis du Conseil Constitutionnel, la garde-à-vue a fait l’objet récemment d’un projet de loi présenté par Michèle Alliot-Marie, Ministre de la Justice et des Libertés. Ce projet de loi était très attendu des avocats, qui trouvaient leur rôle trop figuratif dans la procédure de garde-à-vue auprès de leurs clients, et peu protecteur de leurs droits. Le Conseil Constitutionnel, dans une décision du 30 juillet 2010, a en effet invalidé l’ancien régime de la garde-à-vue, qui ne respectait pas suffisamment les droits de la défense.

Le 19 octobre 2010, nouveau rebondissement : la Cour de Cassation a sanctionné, à son tour, une partie de la réforme de la garde-à-vue présentée par la Garde des Sceaux. Elle estime que les dérogations accordées sur la durée de la garde-à-vue en cas de terrorisme, trafics de stupéfiants et crime organisé, ne respectent pas les droits de la défense. La haute juridiction a en effet demandé la présence de l’avocat pendant toute la durée de la garde-à-vue, même pour les infractions les plus graves, en précisant toutefois « sauf raisons impérieuses ». Comme le Conseil Constitutionnel, la Cour a donc affirmé que les clients doivent avoir droit à leur avocat pendant toute la garde-à-vue, dans un souci de meilleur encadrement des droits de la défense. Mais cette décision de la Cour de Cassation, même si elle insiste sur l’importance de la protection des droits de la défense, ne va pas modifier radicalement les procédures en cours, car la chancellerie a jusqu’au 1er juillet 2011 pour finaliser le projet.

Le projet de réforme propose aussi de rétablir le droit au silence et encadre strictement les fouilles au corps. Ces modifications ont été accueillies favorablement par les syndicats d’avocats et de magistrats. Mais, d’un autre côté, la mise en place d’une « audition libre » pour les infractions moins graves est ressentie comme un recul dans l’avancée de la protection, et laisse subsister une controverse.

La question essentielle de la réforme de la garde-à-vue concernera donc l’équilibre final qui sera établi entre la mise en œuvre d’une mesure privative de liberté et les droits de la défense.

Caroline Balu
Juriste

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