« Le célibataire est celui qui prend le mariage très au sérieux ». Michel Déon

Le 16 novembre 2010, la première chambre civile, de la Cour de cassation, avait saisi le Conseil constitutionnel d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par Mmes Corinne C. et Sophie H., relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des articles 75 et 144 du code Civil. Ce matin, le Conseil constitutionnel dans une décision n° 2010-92 QPC, a écarté le recours des consorts Corinne C. et Sophie H.au motif que « les dispositions contestées ne sont contraires à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit ».

En l’espèce, les requérantes considéraient que le dernier alinéa de l’article 75 et article 144 du code Civil posaient une interdiction au mariage entre personnes du même sexe. De plus, la législation française porterait atteinte à la liberté de mariage ainsi qu’à l’article 66 de la Constitution puisqu’il n’existe pas de faculté de dérogation judicaire à cette interdiction. Est ainsi méconnu un droit à la vie de famille normale et un maintien de l’égalité de toute personne devant la loi.

Le Conseil constitutionnel, concernant l’atteinte à l’article 66 de la Constitution, considère que le motif était inopérant en ce que « la liberté du mariage, composante de la liberté personnelle, résulte des articles 2 et 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ; et que les dispositions contestées n’affectent pas la liberté individuelle ».

A propos de l’atteinte à la liberté de mariage, le Conseil décide que « la liberté du mariage ne restreint pas la compétence que le législateur tient de l’article 34 de la Constitution pour fixer les conditions du mariage dès lors que, dans l’exercice de cette compétence, il ne prive pas de garanties légales des exigences de caractère constitutionnel ».

Sur la méconnaissance d’un droit à la famille, Le Conseil constitutionnel considère que le dispositif législatif est pourvu de cadre juridique tel que le concubinage régi par l’article 515-8 du Code civil ou Pacte Civil de Solidarité (PACS) (articles 515-1 et suivants du Code civil). De tel sorte que « le dernier alinéa de l’article 75 et l’article 144 du code civil ne font pas obstacle à la liberté des couples de même sexe » et « que le droit de mener une vie familiale normale n’implique pas le droit de se marier pour les couples de même sexe ».

Concernant la rupture de l’égalité devant la loi, il ne s’oppose pas à la faculté qu’a le législateur de traiter de manière différente, des situations différentes pour des raisons d’intérêt général. Ainsi, le Conseil juge que « le principe selon lequel le mariage est l’union d’un homme et d’une femme, le législateur a, dans l’exercice de la compétence que lui attribue l’article 34 de la Constitution, estimé que la différence de situation entre les couples de même sexe et les couples composés d’un homme et d’une femme peut justifier une différence de traitement quant aux règles du droit de la famille ; qu’il n’appartient pas au Conseil constitutionnel de substituer son appréciation à celle du législateur sur la prise en compte, en cette matière, de cette différence de situation ».

Le Conseil constitutionnel non seulement ne tranche pas la question du mariage homosexuel mais cette décision lui permet aussi d’affirmer qu’il n’est pas là pour légiférer à la place du législateur. Cela pose bien les limites de la tentation qu’auraient certains justiciables voir la doctrine, à considérer le Conseil constitutionnel comme la Cour Suprême des États-Unis.

Source : Le Conseil constitutionnel, Légifrance

Roselyne G. ATCHIGUE
Juriste

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