« Un bien acquis par fraude ne profite jamais longtemps ». (Sophocle)

Vingt milliards, le chiffre donne le tournis. Ce serait l’estimation de la fraude sociale, réalisée par des députés de droite comme de gauche dans un rapport non encore publié mais déjà dévoilé dans toute la presse.

La fraude sociale regroupe en fait deux réalités très différentes. Tout d’abord, il y a la fraude aux prestations sociales qui concernent les indemnités d’arrêts maladie, les allocations familiales, primes du RSA etc. Et d’un autre côté, il y a la fraude aux cotisations sociales regroupant le travail au noir, le recours abusif aux primes et avantages en nature, etc.

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, le rapport a permis de découvrir qu’en réalité, des deux fraudes, c’est la fraude aux cotisations sociales qui est la plus importante. Les patrons indélicats qui ne déclarent pas leurs salariés, seraient à l’origine de 79% des 10 à 20 milliards d’euros annuels d’arnaque à la sécurité sociale. Cette étude va même plus loin en considérant que « sans cette tricherie massive, quasi banalisée, les comptes sociaux de la Nation pourraient approcher l’équilibre ».

Quant à la fraude aux prestations, elle représenterait des dépenses, pour l’Etat, de 2 à 3 milliards d’euros. Et étrangement, les mesures préconisées par le rapport parlementaire ne touchent essentiellement que les particuliers. Création d’une carte vitale biométrique globale, recoupement d’informations entre les administrations, développement des contre-visites en cas d’arrêt maladie ou encore prime de présentéisme… les pistes sont nombreuses et ambitieuses.

Rares sont les mesures concernant les employeurs indélicats, ce que dénonce le député Dominique Tian. Selon lui, « En France les pouvoirs publics ne se sont jamais sérieusement attaqués au travail au noir parce que l’on y décelait qu’une petite triche permettant à de petites gens de se débrouiller, estime le député UMP Dominique Tian, rapporteur de cette mission. En réalité c’est le champ d’action de bandes organisées qui fausse toute la concurrence ». Ainsi en 2010, les redressements pour travail illégal ne représentaient qu’entre 1,5% et 2,9% de la fraude présumée, soit à peine 185 millions.

Le président de la mission d’évaluation des comptes de la sécurité sociale (MECSS) prône l’instauration d’une procédure de flagrance sociale qui permettrait enfin aux agents de l’URSSAF de dresser des procès verbaux dès qu’ils détectent une infraction de travail au noir. Cependant, les fuites sur le rapport ne désignent pas l’augmentation des contrôles de l’Urssaf comme une priorité dans la lutte contre les fraudes sociales.

A moins d’un an des élections présidentielles où il sera question d’assistanat et de protections sociales, le sujet des fraudes sociales étant extrêmement sensible pour le gouvernement, osera-t-il lutter efficacement contre les patrons voyous ?

Source : Marianne 2, Le Monde.fr

Roselyne G. ATCHIGUE
Juriste

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