« Nous agissons toujours comme si quelque chose dépassait en valeur la vie humaine… Mais quoi ? » (Antoine de Saint-Exupéry)

La question a fait frissonner d’horreur : Al-Jazeera pouvait-elle diffuser les vidéos du massacre de Toulouse ? Les bureaux de la chaîne qatarie ont en effet reçu une clé USB contenant un montage des scènes des meurtres perpétrés les 11, 15 et 19 mars à Toulouse. Qu’en faire ? Cette diffusion doit –elle être consentie au nom du droit à l’information ? Non, évidemment !

La question s’est d’emblée posée d’un point de vue politique : les plus hautes autorités de l’Etat, dont le Président Sarkozy, sont intervenues pour demander que les vidéos ne sortent pas. On aurait sans doute pu y répondre à la lumière de la morale. Cette seule considération aurait suffit à rejeter cette proposition, tant il serait abject de les diffuser et ainsi « respecter la volonté » d’un monstre sanguinaire et narcissique dont la seule ambition était d’imposer au monde sa détestable existence.

La réponse du juriste, sans doute plus froide, n’en est pas moins humaine : l’article 16 du Code civil dispose en effet que : « La loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie. »

Sous ce visa, la Cour de cassation a déjà jugé qu’il y avait bien « atteinte à la dignité de la personne humaine consistant dans la publication d’une photographie représentant le corps et le visage d’une personne assassinée gisant sur la chaussée » (Civ. 1ère, 20 décembre 2000). En l’occurrence, il s’agissait d’une image publiée par Paris-Match sur laquelle le préfet Erignac, assassiné dans une rue d’Ajaccio, gisait sur le sol.

Il est à noter que la Cour a admis que la publication d’une photographie d’une victime d’attentat ne contrevenait pas à la dignité d’une personne ; à la condition toutefois que soit constatée « l’absence de toute recherche du sensationnel et de toute indécence » (Civ. 1ère, 20 février 2001). Dans le cas de la diffusion d’une vidéo réalisée et montée par un terroriste meurtrier, à l’évidence, le droit n’aurait pu l’admettre et un tribunal n’aurait certainement pas manqué de sanctionner sévèrement une telle entorse au droit à la dignité humaine.

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