Depuis 1997, la France s’est dotée d’une cellule administrative spécialisée, baptisée Tracfin, devenue progressivement un rouage capital de la bataille contre le blanchiment d’argent, la fraude fiscale et l’évasion fiscales ainsi que le financement du terrorisme. Si tout un chacun a déjà entendu parler de cet organisme et sait à peu près peu à quoi il sert, la traduction littérale et exhaustive des initiales (soit « traitement du renseignement et action contre les circuits financiers clandestins« ) est peu connue.

Il s’agit d’un Service à compétence nationale qui est rattaché au Ministère de l’Action et des Comptes Publics. Créé pour favoriser le développement d’une « économie saine », Tracfin est chargé de recueillir, analyser et enrichir les déclarations de soupçons que les professionnels sont tenus, par la loi, de lui transmettre (banquiers, assureurs, conseil en investissement, avocats, notaires, huissiers, commissaires aux comptes, experts-comptables, commissaires-priseurs, agents immobiliers, antiquaires …).

Pour mémoire, le décret n° 2009-874 du 16 juillet 2009 a dressé la liste de 16 critères qui sont susceptibles de donner lieu à une déclaration de soupçon de fraude fiscale de la part des professionnels concernés. A titre d’exemples, citons l’utilisation de sociétés écran dont l’activité n’est pas cohérente avec l’objet social ou ayant leur siège social dans un État ou un territoire qui n’a pas conclu avec la France une convention fiscale permettant l’accès aux informations bancaires ; le recours à l’interposition de personnes physiques n’intervenant qu’en apparence pour le compte de sociétés ou de particuliers impliqués dans des opérations financières ; le recours inexpliqué à des comptes utilisés comme des comptes de passage ou par lesquels transitent de multiples opérations tant au débit qu’au crédit alors que les soldes des comptes sont souvent proches de zéro ; le retrait fréquent d’espèces d’un compte professionnel ou leur dépôt sur un tel compte non justifié par le niveau ou la nature de l’activité économique ; le transfert de fonds vers un pays étranger suivi de leur rapatriement sous la forme de prêts ; l’utilisation régulière par des personnes physiques domiciliées et ayant une activité en France de comptes détenus par des sociétés étrangères.

Il est rappelé si besoin est que les professionnels « visés » par la loi ont l’obligation de procéder à une déclaration de soupçon préalablement à l’exécution de la transaction, afin le cas échéant, de permettre à Tracfin d’exercer son droit d’opposition. Par conséquent, ils doivent s’abstenir d’effectuer toute opération pour laquelle ils subodorent un lien possible avec le blanchiment de capitaux ou le financement du terrorisme.

Les professionnels de tous bords sont invités d’une part à se comporter en pourvoyeurs d’affaires pour le fisc, d’autre part, à bien vouloir collaborer avec la Justice. Au point même qu’ils sont tenus de désigner nominativement auprès de Tracfin et de leur autorité de contrôle, les dirigeants ou employés chargés d’assurer respectivement les fonctions de « déclarant » et de « correspondant ». Ces fonctions peuvent éventuellement être assurées par la même personne.

S’il s’avère que telle ou telle déclaration de soupçon correspond effectivement à des mouvements financiers suspects, celle-ci est transmise en fonction de la teneur des informations, aux autorités judiciaires, à la Direction générale des Douanes, aux divers organismes sociaux … et bien entendu à l’Administration fiscale.

Ainsi, chaque année, à l’occasion de la publication de leur rapport annuel d’activité, les responsables de Tracfin aiment à souligner que le nombre de renseignements communiqués à Bercy continue d’augmenter, grâce notamment au processus de transmissions accélérées dites « flash » (n’ayant évidemment rien à voir avec les ventes du même nom !).

La prépondérance de la fraude fiscale dans les informations reçues par Tracfin est due au fait qu’elle est souvent étroitement associée à d’autres schémas de malversations faisant l’objet de déclarations de soupçons, dont essentiellement les abus de biens sociaux, les escroqueries en tous genres, le travail « dissimulé » pour éviter l’autre qualificatif plus parlant …

Par ailleurs, Tracfin participe aux travaux de la cellule opérationnelle interministérielle de décèlement précoce des escroqueries à la taxe sur la valeur ajoutée, dénommée « task-force TVA ». Ce Service qui regroupe les Agents des Finances publiques, des Douanes et des Ministères de l’Intérieur et de la Justice a pour mission d’assurer le pilotage de la lutte contre la fraude à la TVA.

Mais permettons-nous une réflexion …

Si la Cour des Comptes estime que la fraude fiscale progresse toujours en France, cela sous-entend que les véritables délinquants financiers n’ont pas trop peur de tout l’arsenal législatif qui a été mis en place depuis plusieurs années et/ou savent tout simplement redoubler « d’intelligence » pour passer à travers les mailles des filets.

Espérons sincèrement que ce constat est bien pessimiste !

Pour sa part et au quotidien, soit bien au-delà des effets d’annonces et des querelles de statistiques, Avocats Picovschi expérimenté en Droit pénal fiscal depuis plus de 30 ans demeure au service des contribuables (personnes physiques et morales) moins « malins », qui se retrouvent aux prises avec un contrôle fiscal sur « le dos ».

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